L’abandon confiant à Dieu – Deuxième partie

Le problème : les difficultés, les doutes que nous rencontrons pour nous abandonner

Qu’est-ce qui nous empêche de nous confier à Dieu ?
Qu’avons-nous à abandonner à Dieu avec confiance ?

Bien sûr, nous adhérons à la Révélation de Dieu Amour, mais, dans les faits, au quotidien, il nous est très difficile d’accepter ces paroles en profondeur car tout, autour de nous, semble témoigner du contraire.

Dans Matthieu, Jésus-Christ affirme que, dans sa Providence, Dieu veille sur chacune de ses créatures. Mais où voir cette Providence dans le monde actuel déchiré par toutes ces tragédies, ces horreurs, ces injustices, ces souffrances ? Lequel d’entre nous n’a pas un jour pris Dieu à parti en lui demandant si cette vie absurde avait un sens ? Et si oui, lequel ?

Ce qui nous est difficile c’est de vivre dans la réalité quotidienne cet abandon filial à Notre Père.

Est-ce que cela m’est accessible, à moi qui suis pris dans ce monde où je dois subvenir à mes besoins, à ceux de ma famille, où je suis constamment sollicité à faire des choix, à prendre des décisions. N’est-ce pas plutôt l’apanage des saints ? ou de ces laïcs qui sont de grands priants dans le monde ? Est-ce accessible au « commun des chrétiens » que je suis ?

J’ai des difficultés à m’abandonner parce que je résiste. Et je résiste parce que je ne comprends pas bien ce dont il s’agit :

Ce dont il s’agit, c’est d’abandon
L’abandon, c’est l’action de renoncer à la possession d’un bien.
C’est l’action de cesser de s’occuper d’une chose à laquelle on était lié par l’intérêt qu’on lui portait, par un engagement, etc.
Etymologiquement :
A bandon : au pouvoir de
Livrer, exposer, laisser aller
Laisser au pouvoir de quelqu’un, renoncer, quitter définitivement

Nous résistons parce qu’il s’agirait donc de renoncer définitivement à quelque chose que nous possédons, de cesser de nous en occuper, et de laisser ce quelque chose, ce bien, en totale sécurité, au pouvoir de Dieu. Il s’agit de laisser, en toute confiance, Dieu s’occuper de nous et de nos affaires.

Or, RENONCER : voilà qui nous est très difficile. Voilà qui est très difficile pour l’ego.
Pour l’ego, renoncer, signifie perdre. Et à cette perspective, l’ego s’agrippe, s’arc-boute, résiste, se crispe, bref, il a peur :
• Un des obstacles majeurs à l’abandon, c’est la peur. La peur de perdre ce que l’on a, ce que l’on est ; peur de la volonté de Dieu dont on ne sait pas très bien ce qu’elle implique pour nous.
• Nous avons peur de laisser les choses entre les mains de Dieu parce que nous ne savons pas ce qu’Il compte en faire.
• Comme si la Volonté de Dieu et la nôtre étaient en conflit, incompatibles en quelque sorte. Comme si Dieu exigeait de nous ce que nous ne voulons pas donner et nous priver ainsi de ce que nous voulons… Nous avons peur de connaître la Volonté de Dieu parce que nous croyons que ce n’est pas la nôtre.
• Parce que nous confondons peut-être abandon et abdication servile de soi à Dieu.
• Parce que nous avons peur de perdre notre libre-arbitre.
Et comme la peur est liée à un profond sentiment d’insécurité, l’ego ne veut pas lâcher prise, s’abandonner, accepter de ne pas tout contrôler, tout maîtriser. Alors, nous voulons tout maîtriser : les personnes, les situations, les objets, bref tout notre environnement. Et les soucis, les problèmes, les crispations et tensions de toutes sortes proviennent de cette croyance que c’est l’ego qui nous rend fort, qui peut tout comprendre et résoudre, nous fermant ainsi aux motions de l’Esprit-Saint.

Alors, nous nous défions de Dieu. Nous résistons à Son appel. Nous refusons l’Alliance qu’Il nous offre.

Enfin, nous résistons parce que nous voulons être autonomes en dehors de Dieu. C’est-à-dire – et c’est la définition du dictionnaire – que nous voulons nous régir par nos propres lois, nous administrer nous-mêmes.

Silouane (1866-1938) « De la volonté de Dieu et de la liberté »
« L’homme orgueilleux ne veut pas vivre selon la volonté de Dieu car il aime se diriger lui-même. Il ne comprend pas que l’homme ne peut pas se diriger lui-même par sa seule raison et en se passant de Dieu. »

Rappelons-nous ce que nous disait à ce propos Saint-Irénée de Lyon : « C’est à la tentation d’autonomie qu’ont succombé Adam et Eve. Cette immortalité qui devait être le fruit de leur liberté dans la communion à leur Verbe créateur, Satan la leur a présentée comme inhérente à leur nature, ou pouvant être acquise par leurs propres forces. »

Et nous ne voulons pas renoncer à notre autonomie en dehors de Dieu.

Et quand l’ego comprend ce que signifie renoncer à son autonomie en dehors de Dieu, il s’agrippe encore plus fort à ce qu’il a.

Louis-Marie Grignion de Montfort
« Je vous choisis aujourd’hui, ô Marie, en présence de toute la Cour céleste, pour ma Mère et Maîtresse. Je vous livre et consacre mon corps et mon âme, mes biens intérieurs et extérieurs et la valeur même de mes bonnes actions, passées, présentes et à venir, vous laissant un entier et plein droit de disposer de moi et de tout ce qui m’appartient sans exception, selon votre bon plaisir, pour la plus grande gloire de Dieu, dans le temps et l’éternité. »

Saint Ignace
« Prends Seigneur et reçois toute ma liberté, ma mémoire, mon intelligence, et toute ma volonté, tout ce que j’ai et que je possède. Tu me l’as donné, je te le rends : tout est à toi, dispose-s-en selon ta volonté : donne-moi ton amour et la grâce, et cela me suffit. »

Mère Yvonne-Aimée de Malestroit
« Nous offrirons à Dieu notre volonté, notre raison, notre intelligence, tout notre être par les mains et le cœur de la Sainte Vierge. »

Il s’agit donc, pour faire court, d’abandonner TOUT à Dieu, de lui remettre TOUT ce qui fait notre vie.

Donc, je perds. Je perds quoi ? Je renonce à quoi ? Je renonce à mon autonomie en dehors de Dieu. Je renonce à ma volonté propre en dehors de Dieu.

Et si j’accepte de perdre, est-ce que je gagne quelque chose ? Si oui, qu’est-ce que je gagne ?

Je gagne la connaissance de ma dépendance de Dieu, en laquelle, paradoxalement, réside ma liberté. Je quitte la voie de l’orgueil, la voie de l’ego et je choisis la voie de l’humilité qui est le ciment de ma relation à Dieu.

Je perds la peur, l’insécurité, la méfiance ; je gagne la paix et ce sentiment de sécurité profond qui s’appuie sur une confiance indéfectible.

2 réflexions sur “L’abandon confiant à Dieu – Deuxième partie”

  1. Votre texte sur l’abandon me fait penser à une forme de démaîtrise. Renoncer à maîtriser sa vie surtout si elle revêt une forme de consécration. Le baptême est une consécration, n’est-ce pas ? Saint Bonaventure nous dit que dans le baptême, nous recevons comme en germe toute notre vie spirituelle. Nous sommes en état de réception, nous sommes en état de dépendance vis-à-vis même de Dieu. Je dirais la seule dépendance valable pour notre existence. L’abandon, tel que vous le présentez me semble bien être une forme de dé-maîtrise vis-à-vis de Celui qui est : l’Être par excellence. Et pour être avec l’Être, il m’apparaît en effet logique et important de se mettre à l’école de la Volonté de Dieu. La dé-maîtrise pour consentir à se laisser diriger par Dieu et vouloir ce que veut Dieu. Et participer à la vie même de Dieu. Un amour de participation. J’adhère à votre réflexion.

    1. Bonsoir Monsieur,
      Pardon de répondre si tardivement à votre commentaire concernant la conférence intitulée : l’abandon confiant à Dieu. Plusieurs difficultés techniques ont fait que je n’en ai pris connaissance que récemment.
      Il s’agit bien en effet de dé-maîtrise même si ce mot n’a pas été employé tel quel par la conférencière qui a plutôt choisi de parler d’abandon dans la confiance à la volonté d’amour de notre Père du Ciel. Cette volonté d’amour que tout chrétien, en véritable enfant de Dieu, doit s’évertuer à découvrir pour s’ajuster de plus en plus au Christ, et devenir ainsi fils dans le Fils. C’est retrouver notre filialité. Il s’agit d’un abandon actif car Dieu ne fera jamais rien sans notre “oui”, car Il respecte infiniment notre liberté. En fait c’est le “Fiat” de Marie qui nous est demandé… rien de plus, mais rien de moins non plus !
      L’auteur de cette conférence a rejoint brutalement la maison de notre Père du Ciel, c’est la raison pour laquelle je vous réponds à sa place. C’était une très belle âme, rayonnante. Elle s’appelait Sylvie. Si vous le souhaitez vous pouvez la prier pour qu’elle intercède pour vous.
      Belle fin d’Avent dans l’attente de la venue de notre Sauveur !

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