Demain c’est l’an 2000 !

Ecrit au lendemain du second conflit mondial, entre 1948 et 1950, « Demain c’est l’An 2000 » se présente à la fois comme l’acte d’accusation d’une civilisation dont Jean-Gaston BARDET pressent « l’écroulement général », et comme le « vademecum », le manuel de poche à l’usage des petits noyaux chargés de reconstruire.

Car le royaume du mal a désormais pénétré la civilisation occidentale au point de se confondre avec elle, en un mécanisme implacable dans lequel les hommes font le mal en croyant faire le bien, en étant « sincères », ou font le mal parce qu’ils ne peuvent « agir sans déclencher le mal » (p. 273). Bref, « l’Amour a déserté la terre » et la concentration sociale, économique et bancaire écrase la personne humaine (elle qui ne peut être heureuse que dans un monde conçu à son échelle).

A cette société « mécanique » vouée à l’autodestruction, Jean-Gaston BARDET apporte une société « organique », un « entretissage » des personnes, des familles, des quartiers, selon une « organisation polyphonique » du travail, faite de décentralisation et de diversité, de hiérarchie et de complémentarité, à l’image de l’harmonie du Cosmos, de la Création divine.

C’est ici l’urbaniste, au terme de sa carrière, qui trace les plans d’une société où l’amour n’est plus simplement un résidu possible, mais l’inspiration des plans et le moteur des actes.

Loin d’un rêve de velléitaire, ce projet de Royaume restauré et porté par une nécessité théologique aussi imperturbable que la pesanteur : car ce petit livre, rempli de phrases aussi étincelantes que lourdes d’expérience, éclaire notre esprit d’une lumière inspirée et nous réconforte d’une expérience surnaturelle, la seule qui soit appropriée ici : « Il est insensé, écrit encore Jean-Gaston BARDET, de s’imaginer pouvoir, par des initiatives proprement humaines, redresser une situation où les forces du Mal sont l’ennemi. Contre Satan, il n’y a que la Grâce. Il faut n’avoir aucune expérience du Monde pour supposer autre chose. »

Ce ne fut pas exactement l’An 2000, c’est encore demain ; mais ce sera toujours à l’heure de Dieu.